Ceci est une tribune du juriste Amadou Traoré intitulé : “Burkina Faso : la place de la réconciliation nationale et de la cohésion sociale dans l’unité d’action face au terrorisme”.
Le jour de sa prestation de serment devant le Conseil constitutionnel, le Capitaine Traoré, Président de la Transition, a appelé les Burkinabè à s’unir pour lutter contre le terrorisme que notre pays connait et dont la persistance a justifié sa prise de pouvoir le 30 septembre passé. Je ne doute nullement qu’il ait conscience de l’importance de l’union des filles et des fils dans la réussite de la difficile mission de sécurisation du territoire national. Mais qui fait appel à l’unité nationale doit s’assurer de l’entente préalable des différentes composantes sociales.
Je m’étonne donc que le Capitaine Traoré n’ait pas montré lui-même son attachement à l’unité nationale par la nomination dun Gouvernement d’union nationale et par la création d’un ministère en charge de la réconciliation nationale dans le Gouvernement formé par le Premier Ministre Apollinaire Kyelem de Tambèla.
Le regroupement des missions au sein d’un ministère est préjudiciable à l’efficacité de l’action gouvernementale
Le Président de la Transition et le Premier Ministre semblent véritablement attachés à la refondation de l’Etat et à l’atteinte des résultats tangibles par les chefs de départements si l’on sen tient à leurs déclarations. Mais dans ce cas, le regroupement des missions de plusieurs départements entre les mains d’un seul ministre est aux antipodes de l’efficacité recherchée, hormis bien sûr le cas de missions connexes. En poussant le raisonnement, l’on est en droit de penser que le Président ne donne qu’une moindre importance à certaines missions des ministères composites, ce qui pourrait être préjudiciable à ses objectifs de refondation de l’État. En effet, quel besoin avait-on d’associer l’énergie aux Mines et Carrières dans un seul département ? Ensuite, en lieu et place du département ministériel lourd confié à la Ministre Diallo qui aura sans doute de la peine à assurer des résultats dans chaque secteur, n’était-il pas judicieux de constituer trois départements distincts composés, l’un du ministère de la solidarité nationale et de l’action humanitaire, un second du ministère de la cohésion sociale et de la réconciliation nationale, et enfin, un troisième composé du ministère du genre et de la famille ? Et il y en a d’autres, dont le Ministère chargé du développement industriel, du Commerce, de l’artisanat et des petites et moyennes entreprises.
L’existence dun ministère en charge de la réconciliation nationale était indiquée
Lorsque le MPSR a pris le pouvoir en janvier 2022, le Président Damiba a maintenu le poste de Ministre en charge de la réconciliation nationale qu’il a confié au Ministre d’État Yéro Boly.
Aujourd’hui, certains feignent d’ignorer que le fait notable qui a exacerbé les affrontements intercommunautaires et accéléré la montée du terrorisme dans notre pays a été le drame de Yirgou de janvier 2019, auquel le gouvernement na pas su donner les réponses judiciaire, politique et sociale qui s’imposaient en son temps. Seule la réconciliation permettra aux ennemis d’hier de s’associer pour défendre la cause nationale. La réconciliation, vue sous cet angle, doit être insufflée et incombe à l’autorité au plus haut niveau de l’État. Un ministère plein n’était pas de trop pour porter cette mission d’apaisement social qui s’avère aussi importante que la lutte contre le terrorisme.
La nomination d’un Gouvernement d’union nationale aurait préconisé l’objectif d’unité
Inversement, la mise en place d’un
Cela dit, le Capitaine Ibrahim Traoré, Président de la Transition, a besoin de l’accompagnement et du soutien de tous les Burkinabè pour réussir. Qu’il soit également assuré que les voeux de réussite de tous les Burkinabè l’accompagnent, afin que le pays sorte définitivement de cette spirale d’État d’exception pour se consacrer au développement. Mais pour être compris, le Président Traoré devra d’abord s’adresser à la Nation de façon solennelle pour expliquer ses orientations et ses choix ; ensuite, il devra accepter de se soumettre à un exercice périodique de redevabilité pour que la confiance lui soit renouvélée. Pour le reste, il devra s’assumer.
Amadou Traoré
Juriste