[ EDITO ] : le monde s’éffondre à Solhan, la vie continue à Ouaga

Le Burkina Faso a subi l’attaque terroriste la plus meurtrière depuis le début de l’insurrection terroriste en 2015. Au moins 160 personnes ont trouvé la mort à Solhan, dans le Yagha. Près de 200 âmes en quelques heures. Le monde s’est ainsi effondré à Solhan dans cette nuit du 04 au 05 juin. La vie, elle, continue à Ouaga. Insouciance ou résignation? Un réveil s’impose.


“Pour qui sonne le glas?”, s’interrogeait l’écrivain Esrnest HEMINGWAY à travers le titre de son roman de guerre. Pour paraphraser l’homme de lettres américain, on se demandera : “Pour qui sonne le glas de Solhan?”

Le drame singulier de Solhan a suscité l’émoi et la tristesse nationale. Le président du Faso a décreté dans la foulée un deuil national de 72 heures. Les messages de compassion et de solidarité pleuvent de partout.
Si ce massacre est inédit, la scène de condoléances et de condamnations frôle le déjà-vu. Après le massacre de Yirgou le 1er janvier 2019 et celui de Arbinda le 24 décembre de la même année, on avait assisté à des condamnations tout azimut à Ouagadougou, et à des appels à la revolte et au sursaut face au terrorisme. Après le court instant de deuil national, la vie a repris son cours à Ouagadougou. On fait nos affaires, on s’ambiance dans les boîtes de nuit, et on retombe dans l’insouciance générale en se disant que ça n’arrive qu’au Nord, à l’Est.

Au lendemain des tueries de masse, les gouvernants ne semblent pas tirer suffisamment de leçons. La conscience collective, elle, n’a pas encore assimilé le fait que le Burkina soit en guerre. La tâche est exclusivement conférée au gouvernement, aux FDS, et aux volontaires pour la défense de la patrie.
Après Solhan, des têtes doivent tomber, pour l’exemple et pour le signal. Et il faut situer les responsabilités à un moment donné. On ne peut pas continuer dans cet esprit de déni général, dans cette propension à renvoyer tout à Dieu. L’appel à la solidarité et à l’unité autour du combat, doit s’accompagner d’un esprit de fermeté. Il faut donc sanctionner ceux qui ont failli à leur mission. Il faut sévir contre ceux qui se rendent coupables de malversations des deniers publics, dans ce contexte. C’est aussi ça, l’esprit de guerre.

Mais au-delà de ces mesures au sommet de l’Etat, il faut une prise de conscience collective. On ne peut pas revendiquer, mettre le couteau sous la gorge des gouvernants, rejeter toute la responsabilité sur les gouvernants et l’Armée. L’on devrait voir une vague patriotique de citoyens prêts à aller au front, qui se mettent à la disposition de l’Armée.

La bière ne peut pas couler à flot à Ouaga, pendant que 160 corps gisent sur le sol de Solhan. Comme le dit un proverbe mossi, ce qui touche à la tempe arrive dans l’oreille.

C’est pourquoi le président du Faso doit sonner le glas et appeler à une adhésion populaire, en posant des actes forts : par exemple, la recomposition radicale de la chaîne de comandement, une généralisation des cellules VDP dans tous les villages, une meilleure formation pour ces volontaires, la suspension des dépenses publiques non essentielles.

Nous pouvons encore nous relever. A condition que nous ayons conscience de l’état de guerre, et que, gouvernants et citoyens agissent en conséquence.

La Rédaction