Drame de Solhan : condoléances, diagnostic et idées du MBDHP

Ceci est une déclaration du Mouvement Burkinabè des Droits de l’Homme et des Peuples (MBDHP) sur le massacre de Solhan.

Dans la nuit du 4 au 5 juin 2021, des hommes non identifiés, lourdement armés, ont fait irruption dans la commune rurale de Solhan dans la province du Yagha. Ils y ont attaqué, à l’arme de guerre, des populations civiles, tuant au moins 132 personnes, de sources officielles, dont des enfants. Durant plus de quatre (04) heures, les assaillants ont attaqué successivement le site d’orpaillage de Mossiga, le village de Gountouré, la base des volontaires pour la défense de la patrie (VDP) de Solhan, avant d’achever leur sale besogne sur un second site d’orpaillage de Solhan. Plus d’une centaine de blessés dont des enfants ont été admis au Centre médical avec antenne chirurgicale (CMA) de Sebba. Les cas les plus graves ont été transférés au Centre Hospitalier Régional (CHR) de Dori. D’importants dégâts matériels ont également été enregistrés : véhicules, tricycles et maisons incendiés, boutiques pillées et incendiées, etc.
En ces circonstances particulièrement douloureuses et choquantes, le MBDHP présente ses condoléances à l’ensemble des familles des victimes de ces tueries et formule ses vœux de prompt rétablissement aux blessés.
Cette attaque, qui est l’une des plus meurtrières que notre pays ait connu, constitue le point culminant d’une série d’attaques enregistrée ces dernières semaines. Ces derniers mois ont, en effet, été caractérisés par une reprise sanglante des attaques terroristes qui ont particulièrement visé des populations de plusieurs localités reculées de notre pays. Cette situation suscite l’indignation et les condamnations légitimes de nombre de Burkinabè, qui expriment de plus en plus un sentiment légitime de colère et de révolte.

La persistance des attaques terroristes depuis 2015, selon des modes opératoires bien connus, indique clairement l’incapacité du gouvernement à assurer rigoureusement la sécurité des populations et de leurs biens, par des mesures d’orientation et des méthodes d’actions efficaces. Pour preuve, des pans de plus en plus importants du territoire national sont de fait sous le contrôle de groupes terroristes. De façon progressive et méthodique, ces derniers étendent leurs tentacules dans plusieurs localités du pays, notamment dans les Régions de l’Est, du Nord et du Sahel où les populations sont à la merci de hordes de hors-la-loi qui pillent et tuent sans retenue.
Cette situation a provoqué un déplacement massif de populations vers des zones qu’elles jugent plus sûres. Ainsi, à la date du 31 mars 2021, notre pays comptait 1.147.699 personnes déplacées internes. Les évènements de ces dernières semaines ont accru ce nombre.

Face à cette situation qui se dégrade de jour en jour, il devient urgent et nécessaire de situer les responsabilités. En effet, depuis le début des attaques terroristes, le MBDHP ainsi que plusieurs autres organisations, n’ont eu de cesse d’interpeller les autorités actuelles sur la nécessité de prendre des mesures urgentes et concrètes pour rendre effectif le droit des populations à la sécurité. Jusqu’ici, ces interpellations sont restées vaines ; nos autorités préférant s’emmurer dans un véritable négationnisme suicidaire.

Déjà, à travers une déclaration parue le 17 mai 2019 et consécutive à plusieurs attaques terroristes contre des populations civiles ainsi que les Forces de défense et de sécurité (FDS), notre Mouvement appelait les autorités à « asseoir une stratégie de lutte antiterroriste qui favorise une large adhésion et une implication effective et efficiente des populations sur l’ensemble du territoire national ». Ce n’est qu’au mois de février 2021 (soit plus de 6 ans après la première attaque terroriste marquante) que le Chef de l’Etat a mis en place un comité d’experts en vue d’élaborer (enfin !) une stratégie nationale de lutte contre le terrorisme.


Jusqu’ici hélas, en lieu et place d’une stratégie coordonnée, impliquant une participation active des populations à la réalisation de leur droit à la sécurité, nos autorités ont privilégié des actions d’éclat à travers notamment des exécutions sommaires et extrajudiciaires qui étalent aujourd’hui toutes leurs limites.


Par ailleurs, l’un des faits marquants des attaques terroristes est l’absence de réaction rapide de la part des FDS. Ce fut le cas à Yirgou, à Koutougou, à Arbinda, à Barga et dans bien d’autres localités. Cette situation met à nue la faible capacité de réaction rapide de nos FDS. Elle indique surtout que l’amélioration effective et soutenue des conditions de vie et de travail des éléments des FDS constitue aujourd’hui et plus que jamais, un impératif de premier ordre !
Face à cette situation, le MBDHP appelle instamment nos autorités à :
o Œuvrer de manière plus efficace à assurer la sécurité des personnes et de leurs biens, sans discrimination sur toute l’étendue du territoire national ;
o Améliorer les conditions de vie et de travail des éléments des FDS (policiers, gendarmes, soldats de tous les corps militaires et paramilitaires) ;
o Faire cesser les exécutions sommaires et extrajudiciaires pratiquées dans plusieurs localités de notre pays, afin d’évacuer la peur et la méfiance des populations civiles à l’égard des éléments des FDS ;
o Prendre en charge de façon adéquate les blessés des attaques terroristes ainsi que les personnes déplacées internes et à créer les conditions de sécurité pour leur retour dans leurs villages et foyers.

Ensemble, disons non au terrorisme !
Exigeons de l’Etat la prise de mesures sérieuses pour l’effectivité de notre droit à la sécurité !

Fait à Ouagadougou le 07 juin 2021

Le Comité exécutif national