Imhotep BAYALA : “Notre laïcité est malade et il faut impérativement la repenser”

C’est sous le thème « Profanation de biens, patrimoine culturel et spirituel par la paroisse Saint Pierre de Gounghin” que des adeptes de la foi traditionnelle ont organisé une conférence de presse dans la matinée de ce jeudi 29 avril 2021, au siège du Mémorial Thomas SANKARA à Ouagadougou. Une réponse à l’incinération de gadgets spirituels traditionnels qualifiés de « fétiches » au sein de la Paroisse cité plus haut.

La déclaration a connu la signature de plusieurs garants de la tradition. Il s’agit entre autres, du Haut conseil des dozos du Burkina Faso, de l’Association Culturelle de Koombi Culture, de Faso Kudumde, de Miirya, de Maaya Blon, et du Cadre “Deux heures pour nous, Deux heures pour Kamita”.

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Avant le début de l’activité, les conférenciers ont adressé une prière aux mannes des ancêtres. C’est Lianhoué Imhotep BAYALA du Cadre “Deux heures pour nous, Deux heures pour Kamita”, qui était le principal animateur de la conférence. Il avait à ses côtés Pingdwendé KIENTEGA de Faso Kudumde, et Bia DRABO du Haut conseil national des dozos du Burkina Faso.

En rappel des faits, M. BAYALA a déclaré que le 20 avril 2021 s’est tenue une cérémonie d’incinération de gadgets spirituels qualifiés de fétiches, à la Paroisse Saint Pierre de Gounghin. Une cérémonie qui, selon lui, entrait dans le cadre de la neuvaine de prière de ladite paroisse. Pour Imhotep BAYALA, ce n’était certes pas la première fois, mais plutôt la Nième provocation d’une interminable série d’actes du même type posées par les religions dites « religions révélées ». Ces religions qui, selon lui, ont pourtant bénéficié de l’ouverture et de l’hospitalité de leur ainée qu’est le culte aux ancêtres (animisme). « C’était assurément la provocation de trop au regard du contexte socio-politique national et de l’évolution substantielle des mentalités en matière de pluralité religieuse », a-t-il confié.

M.BAYALA a indiqué que courant l’année 2020, au moins trois cas d’intolérance religieuse, avec pour unique cible la foi traditionnelle, ont été constatées avec comme point culminant la colère de la communauté « Gan » confrontée à une église protestante dans le Sud-ouest. Ces évènements se sont déroulés le 17 au 18 avril 2020, “pratiquement un an jour pour jour avant le forfait de la paroisse Saint Pierre de Gounghin”. Des agissements que le Secrétaire Général du mouvement Deux heures pour nous, Deux heures pour Kamita  qualifie d’actes regrettables et incompréhensibles, du fait qu’une loi nationale reconnait officiellement la foi traditionnelle comme une composante essentielle et indispensable de la diversité religieuse burkinabè. Il a tenu à rappeler que le Burkina Faso est une république au fonctionnement régi par la laïcité. Cette laïcité qui, pour lui, est le fruit de la tolérance de la foi traditionnelle.  « Notre laïcité est donc malade et il faut impérativement la repenser dès maintenant pour prévenir de possibles dérapages menaçants la concorde nationale et la construction d’un Etat-nation, où tous et tout ont une place », a-t-il ajouté.

M.BAYALA a également expliqué que cette conférence de presse fait suite à une plainte contre la Paroisse Saint Pierre de Gounghin pour les faits d’attentat aux symboles d’une foi légalement reconnue, et pour atteinte grave à la coexistence pacifique entre communautés religieuses. La procédure, selon lui, est une interpellation préventive à l’endroit des autorités tant religieuses, coutumières que politiques. Elle est également une invite faite à chaque composante de la société, afin qu’elle veille en toute circonstance à poser des actes responsables pour ne pas envenimer une situation déjà tendue.

Pour l’heure, Imhotep BAYALA a invité les autorités traditionnelles des quatre coins du Burkina Faso à réfléchir à la création d’un Haut conseil de la foi traditionnelle, pour porter un point de vue unifié de la tradition partout où cela est nécessaire. Il a invité les fidèles des différentes communautés religieuses à se désolidariser de tout acte de profanation et d’intolérance religieuse à même de mettre à mal la coexistence pacifique de notre pays. «Nous affirmons que les pires ennemis de notre nation en devenir sont les profanateurs de sa riche diversité culturelle et spirituelle», a conclu M. BAYALA.